Les nonnes ordonnées et leur histoire : récit par le Karmapa
7 mars 2017 - Pavillon du Meunlam, Bodhgaya
Ce matin, dans la deuxième partie de son enseignement, le Karmapa nous fait part de ses recherches sur l’histoire des nonnes et de leur statut. Il explique d’abord l’origine du terme ‘Arya Kshéma’, qui est donné à la Rencontre du dharma chaque hiver. Il fait remarquer que parmi les disciples du Bouddha Shakyamouni, il y avait ses huit plus grands disciples moines, connus pour leur prajna (suprême sagesse) ou les miracles qu’ils accomplissaient, etc. mais il y avait, également, de grandes disciples femmes bien connues pour les miracles qu’elles accomplissaient, leur prajna ou d’autres qualités exceptionnelles. Arya Kshéma était l’une d’entre elles et elle est décrite dans le Soutra des sages et des fous comme la plus excellente quant à la sagesse et la confiance ; et donc la rencontre d’hiver du dharma porte son nom.
Le Karmapa précise : « En donnant ce nom à la rencontre, nous suivons le dicton qui dit ‘Les disciples nouveaux doivent suivre l’exemple des maîtres passés.’ Autrefois, à l’époque du Bouddha Shakyamouni, il y avait des femmes arhats, des bhikshunis, et des femmes à l’octuple pureté. Mon idée est que nous pouvons les prendre pour exemple, nous entraîner dans les enseignements bouddhistes comme elles l’ont fait et obtenir le résultat qui est la libération. J’ai pensé qu’elles pourraient nous inspirer et être un modèle. »
« En fait, au départ, nous avions projeté d’organiser une conférence durant cette rencontre pour les nonnes. Le sujet principal devait être la vie d’individus remarquables qui ont obtenu la libération dans un corps de femme, en particulier les bhikshunis qui ont été des disciples majeurs du Bouddha Shakyamouni. Mais nous n’avons pas eu assez de temps et ça ne s’est pas fait ; nous verrons cela plus tard.
En tout état de cause, dans l’histoire tibétaine, Karma Chakmé a écrit ‘le Dharma des ermitages de montagne pour les nonnes’, et c’est une question à laquelle les historiens ne se sont pas assez intéressés. Ce texte appartient au genre de textes appelé ‘dharma des ermitages de montagne’, une compilation d’instructions de méditation utilisées dans les retraites de montagne, et Karma Chakmé a compilé ce texte spécialement pour les nonnes. Il écrit qu’à l’époque (du 10e Karmapa), au Tibet central, il y avait plus de monastères de nonnes que de monastères de moines ; toutes les nonnes de ces monastères avaient une bonne base de discipline et elles gardaient parfaitement les préceptes. Pour cette raison, historiquement, les enseignements des nonnes se sont largement diffusés au Tibet.
Mais ceux qui ont écrit l’histoire n’y ont pas prêté beaucoup attention, et plus tard, rares ont été ceux qui se sont intéressés à la diffusion du dharma chez les nonnes au Tibet, et aux grands êtres qui sont apparus dans un corps de femme. Cependant, l’histoire et les faits montrent que de nombreux individus ont obtenus les accomplissements dans un corps de femme, et il y a eu aussi de nombreuses érudites ; les communautés de nonnes ont donc du être très prospères. »
« De même, quand une communauté monastique s’est établie pour la première fois au Tibet - à l’époque du Roi Trisong Détsèn (742-800) - il y avait ‘Sept hommes à tester’. Certains disent ‘Sept hommes’, d’autres disent ‘Six hommes’. Mais, que ce soit six ou sept, quand s’est établie une communauté monastique pour la première fois, ce ne sont pas seulement des hommes qui se sont engagés, mais également des femmes ; par exemple, parmi les reines, celles qui n’avaient pas eu d’enfants se sont engagées. Quand elles se sont engagées et ont été ordonnées, je ne pense pas qu’on les ait appelées nonnes et qu’elles aient porté l’habit monastique. Quand on dit les ‘Sept hommes à tester’ se sont engagés, on comprend clairement qu’ils ont reçu l’ordination complète. De même, quand à l’époque, des femmes se sont engagées, je ne pense pas que cela signifie qu’elles aient simplement pris les vœux intermédiaires d’engagement. Donc il semble que, quand le bouddhisme a commencé à se diffuser au Tibet, une communauté de femmes ordonnées s’est implantée.
Il existe également des histoires intéressantes de la lignée Sakya, appelées ‘Chroniques des Rois et de la Lignée familiale Sakya’. Elles attestent que nombre de filles nées dans la lignée familiale Sakya sont devenues bhikshunis, et il en est fait de nombreux récits. Plus tard, certains ont prétendu que ces histoires n’étaient pas vraies mais c’est un peu difficile à admettre. D’un côté, les ‘Chroniques des Rois et de la Lignée familiale Sakya’ sont considérées comme des documents historiques fiables. Il est aussi un peu difficile de dire que ce sont seulement les histoires de femmes qui s’engagent ou deviennent bhikshunis qui sont fausses, mais que tout le reste est vrai. En outre, parmi les érudits de Minyak, l’un d’eux s’appelait Kashiwa Rikpé et sa biographie précise qu’il y avait une communauté de bhikshunis à Minyak Rapgang, et qu’il y avait trois ou quatre cents monastères de nonnes. Il y a donc eu une époque au Tibet où on trouvait de nombreuses comm