Deux objets précieux du passé
26 février 2017 - Pavillon du Meunlam, Bodhgaya
Le Bangladesh est lié à deux figures importantes de l’histoire du dharma tibétain. C’est de la ville de Chittagong (autrefois, Chativaho) que vient le mahasiddha Tilopa (entre le 10e et le 11e siècle). Il est à l’origine de la lignée Kagyu et est considéré comme l’incarnation de Chakrasamvara, la principale divinité de yidam Kagyu dont le Gyalwang Karmapa a conféré l’initiation le 6 février au Pavillon du Meunlam. Le Bangladesh est aussi le lieu de naissance d’Atisha Dipankara (982-1054), le grand maître Kadampa qui, dans la deuxième partie de sa vie, a enseigné au Tibet où il a eu une large influence sur le développement du bouddhisme dans le pays.
Bien que, de nos jours, le Bangladesh soit essentiellement un pays musulman, le bouddhisme prédomina dans la région jusqu’au 11e siècle, et aujourd’hui 3 des 170 millions de ses citoyens sont bouddhistes, ce qui en fait la troisième religion du pays. Plus de 65% de la population bouddhiste est concentrée dans la région de Chittagong, d’où est originaire Tilopa.
Sa Sainteté Sanghanayaka Suddhananda Mahathéro, qui est venu au Pavillon du Meunlam aujourd’hui, est le chef du monastère bouddhiste Dharmarajika et le Patriarche de la Sublime Sangha de Mahanikaya Bangladesh. En 1978, il se rendit en Chine pour récupérer de précieux objets bouddhistes, dont un stoupa contenant les précieuses cendres d’Atisha et un très vieux texte tibétain de sa biographie sous la forme d’une supplique, composée par Dromtœnpa (1004-1064), son principal disciple et le fondateur de la célèbre lignée Kadampa. Le texte est intitulé ‘Supplique à Jowo Jé Paldèn Atisha présentant l’histoire de sa vie’.
Le Mahathéro, qui a 86 ans, décida d’offrir une partie des cendres d’Atisha au Karmapa de façon à établir une connexion avec le Tibet. Il créa une réplique dorée du stoupa d’origine et plaça une partie des cendres dans une coupelle légèrement incurvée avec un couvercle en forme de dôme. Transportant le stoupa et le texte, le Mahathéro entreprit un long voyage depuis son monastère bouddhiste de Dharmarajika à Dhaka jusqu’au pavillon du Meunlam à Bodhgaya afin d’offrir le stoupa au Karmapa et lui montrer le précieux texte. Le Mahathéro est entouré d’une dizaine de personnes, dont le Docteur Kalyan Priya Bhikkhu, abbé du monastère bouddhiste du Bangladesh à Bodhgaya, Ranjit Kumar Barua, ancien Secrétaire d’état du gouvernement de la République populaire du Bangladesh, Nandita Barua, Vice-présidente de la Branche féminine de la sangha Bouddha Kristi Prachar du Bangladesh, et Wasfia Nazreen, qui a organisé l’événement.
Avant de se diriger vers la scène du Pavillon, le Karmapa va à la rencontre du Mahathéro, dont l’attitude très chaleureuse (il étreint le Karmapa d’un geste paternel) tranche avec la formalité habituelle. En souriant, les deux hommes s’avancent vers la scène, et le stoupa est placé dans un élégant pavillon d’argent sur le trône du Karmapa. On offre au Mahathéro un siège élevé, tandis que son entourage, dont tous viennent de Chittagong, est assis tout près.
Après la cérémonie de la Coiffe rouge, il ouvre le stoupa pour montrer au Karmapa la coupelle qui contient les cendres ; avec grande révérence, le Karmapa la place sur sa tête, puis sur celle de Gyaltsap Rinpoché. Le Karmapa reçoit en cadeau une thangka des trois divinités de longue vie - Amitayus, Tara blanche et Ushnisha Vijaya -, et à son tour, le Karmapa offre au Mahathéro une magnifique statue du Bouddha. Un chaleureux sentiment d’amitié flotte sur la scène à ce moment-là, et aussi l’assurance que les précieuses reliques du grand Atisha auront une place de choix sur l’autel du Karmapa.