Le Flambeau du Chemin de l’éveil - Enseignement du Gyalwang Karmapa
La Compassion est l’essence de la voie
C’est à Bodhgaya où Sa Sainteté le 17ème Karmapa préside le Kagyu Monlam depuis 2004 et enseigne à ses disciples. Cette année une grande grande scène a été mise en place pour recevoir ses enseignements et pour les représentations culturelles.
Au-dessus de l’amphithéâtre se trouvait des arcs imposants recouverts de draps bleus azurs et au milieu une voûte d’or flottant comme le soleil dans l’espace vide. En dessous était érigée une statue du Bouddha Shakyamouni dans une coquille de la lumière rayonnante, et une statue du Premier Karmapa Dusoum Khyènpa, ressemblant à une personne vivante. Plusieurs personnes l’ont même confondu avec le Karmapa pensant qu’il était arrivé plus tôt pour méditer. Juste après une cascade de bouquets de fleurs se tenait le trône du Karmapa entouré de fleurs. Depuis l’entrée du hall qui abritait des milliers de personnes, la vue de l’allée centrale donnait une image magnifique et vaste de la toute lignée, descendant du Bouddha au Premier Karmapa, jusqu’au présent 17ème Karmapa, Orgyèn Trinley Dorjé.
Avant le début des enseignements, toute la sangha monastique et laïque entonnait le chant du mantra « KARMAPA KHYENO » (KARMAPA, Vous qui savez) emplissant ainsi le début de la matinée d’une douce mélodie de paix. Le son aigu des gyalings (trompettes tibétaines) marquât l’arrivée de Sa Sainteté dans l’allée centrale, qui en face du trône de Dusoum Khyènpa et du Bouddha fit trois prosternations et s’installa sur son trône.
Suivis de plusieurs chants incluant des chants de bon augure, des offrandes pour sa longue vie ont été effectuées par Gyaltsap Rinpoché l’un des regents de la lignée Karma Kamtsang Kagyu ainsi que par l’enseignant du Karmapa Khènchen Thrangu Rinpoché, le responsable spirituel du monastère de Tergar Mingyour Rinpoché, Bagyod Rinpoché (le détenteur de la statue de Dusoum Khyènpa, qui fera le tour du monde cette année), puis Lama Chodrak, le principal organisateur du Kagyu Monlam. Après lui avoir fait la requête de tourner la roue du Dharma, les mains jointes et avec respect, l’esprit tourné vers les Bouddhas et la lignée, le Karmapa a récité des prières.
Pour commencer son enseignement, le Karmapa a retracé l’histoire de ses enseignements qui ont débuté à Bodhgaya, dans une petite salle de l’Hôtel Mahayana. Trop petite, ils se sont ensuite tenus au temple Taiwanais puis dans le grand hall du monastère de Tergar, pour enfin avoir lieu dans ce vaste site, non loin du monastère de Tergar, où des milliers peuvent s’y rassembler.
Le Karmapa a ensuite expliqué qu’Atisha peut être est rattaché à la lignée Kagyu au travers de Gampopa, qui a d’abord étudié au sein la lignée Kadampa avant de rencontrer Milarepa et reçu ses enseignements sur le Mahamoudra, le Grand Sceau. Gampopa a unifié ces deux courants créant ainsi les pratiques principales de la lignée.
Le Karmapa : « Je voudrais mentionner que si il y a quelque chose de bon ou de positif dans ce que je dis, s’il vous plaît, retenez le et essayez de le pratiquer. L’auditoire principal de ces enseignements vient de la région de l’Himalaya. Il y a aussi un public international, donc s’il vous plaît prenez en compte ce que vous allez écouter.
Shantidéva a écrit que la vie humaine est difficile à obtenir et si nous ne l’utilisons pas de manière positive, nous pourrions ne pas en retrouver une autre. Ceci, bien sûr, se rapporte à la première des quatre pensées qui détournent l’esprit: la précieuse existence humaine.
Il ne suffit pas de comprendre cela intellectuellement, cela doit profondément nous toucher. Une naissance humaine est si difficile à obtenir car cela demande plusieurs causes différentes. On peut penser du fait qu’il y a un problème de surpopulation dans le monde, comment peut-il être si difficile d’obtenir une existence humaine ? Mais nous parlons ici d’une précieuse naissance humaine, cela est très particulier et exige beaucoup d’actes positifs crées dans le passé. Pensez combien il est difficile de faire un acte positif, puis penser combien il est difficile de faire cela en tous temps. Les êtres humains sont dotés d’une intelligence leur permettant de faire des distinctions entre ce qu’ils doivent cultiver et ce qu’ils doivent abandonner. Nous devons aussi ouvrir notre coeur pour y inclure tous les êtres, aussi vaste que l’espace, et comprendre ce qui peut leur être bénéfique ou nuisible. Cela ne doit pas être simplement un acte mental, nous devons essayer de les aider concrètement. Autrement, notre intelligence peut devenir plus dangereuse que le plus féroce des tigres. En somme, nous devons réfléchir attentivement et de manière plus vaste.
Si nous sommes de vrais pratiquants du Dharma, la dévotion seule ne suffit pas. Le premier point du Dharma est d’apprécier la précieuse existence humaine, être conscients des actes positifs et des méfaits que nous engendrons. Pour atteindre l’éveil comme le Bouddha Vajradhara, nous devons tout d’abord devenir un bon être humain et comprendre notre esprit. Sinon nous imitons juste les autres.
Nous devons parler un peu de l’auteur de ce texte. Paldèn Jowo Atisha est né dans le Bengale et est devenu un être parfaitement réalisé. Son action la plus inspirante fut sa venue au Tibet pour y tourner la roue du Dharma en donnant des enseignements profonds, incluant Le « Flambeau du Chemin vers l’Eveil ». Tous les enseignements sur les étapes de la voie découlent de ce texte. Il a été dit que si Atisha n’était pas venu au Tibet, les Tibétains seraient resté aveugles.
Cet enseignement est important parce qu’il est profond et non-sectaire. C’est dans son université, Vikramashila, que toutes les écoles lui ont demandées de devenir leur guide. Atisha connaissait et respectait toutes les différentes écoles et les véhicules, y compris les enseignements profonds de Nagarjuna et ceux d’Asanga et comprit qu’il fallait être en harmonie avec ces différentes écoles.
Ensuite comment devons-nous écouter ces enseignements ? Pensons que notre gorge est sèche et que nous avons désespérément besoin d’un verre d’eau. Certaines personnes pensent qu’ils connaissent déjà le Dharma, alors leurs esprits sont pleins de fierté et ne peuvent donc rien entendre. Ne soyons pas ainsi. Il existe de nombreuses façons d’enseigner, mais je pense qu’il est important d’enseigner ce qui va droit au cœur et ce qui nous inspire. Je ne veux rassembler à quelqu’un d’instruit, mais je souhaite vous donner ce qui est utile. Tous les enseignements du Bouddha enseignent sur la façon de se transformer. Ne m’écoutez pas simplement, vous devez vous remettre en question afin que vous puissiez vous transformer.
Nous essayons de devenir éveillés en cherchant la sagesse qui nous libérera de notre ignorance. Nous ne parlons pas ici de religions ou d’écoles, mais d’un enseignement sage, qui peut être bénéfique et être appliqué de manière positive. Nous ne devons pas jeter cela comme l’on jette de l’herbe à un cheval.
L’un des Karmapas a dit que notre samsara est un petit samsara et que celui du Bouddha est un immense samsara. Comment devons- nous comprendre cela ? Nous sommes en fait centrés sur le samsara limité de notre vie alors que le Bouddha est constamment dans le samsara pour aider les êtres et il n’y a pas de fin à cela. Le samsara est le bureau du Bouddha, c’est son champ de travail et il n’est jamais au repos.
Les Bodhisattvas aident tous les êtres, même les personnes qui ne se préoccupent que de cette vie. En fait, c’est le premier type d’individu parmi les trois types de catégories de personnes dont parle le texte d’Atisha. Le second est celui qui souhaite être libre du samsara. Le troisième est celui qui œuvre pour le bienfait des autres. Nous devons réfléchir à quelle catégorie nous nous appliquons. Il est dit qu’il n’y a pas de différence dans la profondeur du Dharma, mais qu’elle se trouve dans la profondeur de notre esprit. Nous devons connaître suffisamment notre esprit pour savoir quel est le bon moment pour pratiquer. Si en tant que débutant nous essayons de marcher sur une corde élevée, nous rencontrerons sans doute Yamaraja (le Seigneur de la Mort).
Pour les grands êtres, tout est accompli avec compassion. Le souhait d’éliminer la souffrance de tous les êtres sensibles est la motivation du Mahayana. De plus, le Vajrayana apporte un sentiment d’urgence à notre souhait de libérer les êtres de leur souffrance, et cela donne un engouement spécial pour la pratique. Si vous tombez dans le feu vous n’y resterez pas tranquillement, mais vous en sortirez urgemment. De la même façon, quand vous voyez des êtres qui souffrent, il n’y a pas de temps pour faire une pause. Le Mahayana signifie le “Grand Véhicule”, il est grand du fait de la grande compassion. Dans quel mesure pouvez-vous être responsable ? Pour une personne ? Pour plusieurs ? Si vous êtes capable de prendre la responsabilité des autres, alors que vous portiez le nom d’un pratiquant du Mahayana ou non, vous en êtes un.
Nous devons réfléchir sur la compassion sous différents angles et pas qu’intellectuellement, mais du plus profond de notre cœur et de nos tripes. Lorsque la Bodhicitta qui est le souhait d’atteindre l’éveil pour le bien d’autrui, s’élève en nous, nous sommes alors des bodhisattvas. Mais si nous laissons tomber un seul être, si nous abandonnons ne serait-ce qu’une seule personne, nous perdons alors cette bodhicitta.
Il y a des gens qui se demandent pourquoi il y a peu de Bouddhistes. La raison est que le fait d’être un Bouddhiste est difficile: nous devons étudier et pratiquer. La plupart des personnes veulent quelque chose de facile, vous tendez la main et vous êtes servi. C’est par l’étude et la pratique que les Bouddhistes recherchent deux bénéfices : l’un temporaire et l’autre ultime. La première nous protège des renaissances inférieures et de la souffrance dans ce royaume ; la seconde est le plein éveil. Nous devons comprendre ce que sont les bienfaits de la Bodhicitta et avoir la motivation de les obtenir.
La racine de la Bodhicitta est l’amour et la compassion, mais la compassion est plus importante. Nous pouvons la développer en pensant à nous-mêmes et à notre propre corps. Nous pouvons expérimenter combien nous souhaitons éviter la souffrance et combien nous souhaitons intensifier notre liberté. Ensuite, nous pouvons étendre cela et comprendre que tous les êtres ont le même souhait que nous. Il ne faut pas penser que nous sommes ici et que les êtres sont là-bas. Si nous voyons quelqu’un qui souffre, nous nous questionnons : «Qu’est-ce que je ressentirai si j’avais cet inconfort ? ». Nous devons ressentir leur situation.
Il y a plusieurs religions, cultures, histoires, et civilisations, mais nous tous, vivons sous le même soleil et la même lune sur une même planète. Nous respirons la même oxygène, nous sommes comme une famille. Nous devons sentir la souffrance et le bonheur des autres : nous prenons sur nous toute la souffrance des autres et partageons notre bonheur avec eux. Il y a un dicton célèbre : « Si j’ai le bonheur, puisse-t-il être partagé avec tout le monde, si les autres souffrent, puissè-je porter toute leur souffrance ! ».
Sessions de l’après-midi
La discorde mènera ultimement à la destruction du Dharma
(Ce qui suit est un résumer des enseignements de la traduction anglaise du tibétain et non une transcription)
Les enseignements du Bouddha ne contiennent pas de contradictions mais sont des moyens habiles pour atteindre plusieurs personnes de niveaux différents sur le chemin de l’éveil. La tradition tibétaine des enseignements du Bouddha inclue le Tripitaka et les Quatre Tantras. Les enseignements existent en parallèle avec l’expérience et lorsque le sens profond est compris, même si il y a différentes façons d’expliquer les mots et que le niveau peut être différent, il n’y a pas de contradiction. Si vous comprenez correctement le sens profond des enseignements, vous comprendrez comment tous les enseignements du Bouddha dont les traités des maîtres Indiens etc. contribuent tous en tant que méthodes sur le chemin de l’éveil.
Les érudits qui expriment des doutes sur l’authenticité du fait des contradictions, se concentrent sur la science des mots et non sur le sens profond. Parfois le Bouddha a affirmé que le soi existait et parfois il en a nier l’existence, pour autant il ne se contredisait pas mais par compassion il utilisât des moyens habiles pour aider les êtres en accord avec leur capacité.
Le sens profond du Dharma ne reside pas dans les apparences extérieures comme les statues ou les monasteries. Les différentes écoles du Bouddhisme Tibétains ressemblent plus à un marchand de tapis ventant les qualities de son produit, car elles correspondent aux besoins de leurs clients. Cependant les gens sont souvent confus et ne voyent pas plus loin que ces artifices extérieures, adherent par erreur à la pensée que leur école est la meilleure et que les autres sont fausses. Le Dharma n’est pas quelque chose de superficiel mais est l’enseignement associé à l’expérience.
Le premier point important du Flambeau sur le chemin de l’Eveil de Jowo Atisha est qu’il apporte un enseignement complet sur la voie vers l’éveil, depuis ses fondations jusqu’à la realization ultime. Une telle vision d’ensemble nous aide à comprendre l’enseignement et qu’il n’est jamais contradictoire. .
Le deuxième point important de ce texte est qu’il contient toutes les Paroles du Bouddha, d’où son nom Kadampa ( Ka signifiant la parole, et dam les instructions ; tradition fondée par Jowo Atisha , disciple de Dromton Gyelway Jungnay). Ainsi, les instructions du Bouddha sont destinées à aider un individu à avancer sur la Voie de l’Eveil, il en est de même pour tous les mots des trois corbeilles et pour toutes les instructions des quatre tantras. Le flambeau sur la voie de l’éveil est un enseignement qui peut être pratiqué au quotidien ; écrit dans un style facile à comprendre il inclus la pratique principale, ses annexes, toutes les méthodes et toutes les instructions nécessaires pour que chacun puisse atteindre l’éveil.
D’abord nous devons méditer sur la précieuse existence humaine. Nous devons efforcer à cette pratique jusqu’à l’obtention d’une compréhension complète et jusqu’à ce que nous en apprécions le sens véritable, même si cela doit prendre toute une vie. Certains pratiquants pense qu’une pratique doit s’accomplir pendant une certaine période puis en redemande une nouvelle. Ils vont parfois d’un lama à l’autre à la recherche d’une nouvelle pratique. Ils disent : « J’ai pratiquer Chenrézig, maintenant dois-je pratiquer Tara ? ».